"Depuis 1995 j'expose régulièrement à Paris puis en Belgique dans des salons ou galeries. J'ai toujours été en priorité intéressée par le dessin, la morphologie, les portraits, les personnages. Mes peintures ont rapidement été de grands formats. En 1995, j'ai commencé à peindre sur des toiles découpées avec des formats inhabituels. La toile ne laissait pas ou peu de place au fond.
Je cherche depuis quelques années des lieux vastes qui me permettent d'exposer ces grands formats.
La proposition de participer à ce circuit arrive bien dans mon parcours. J'ai essayé d'adapter la réalisation de mes panneaux de toile découpée à cette église qui s'y prête bien.
Le concept d'un lieu du patrimoine à habiter entièrement dans un circuit commun avec d'autres artistes m'a plu. L'Art contemporain, c'est aussi rencontrer les autres et s'intéresser à leurs démarches variées.
Le tremplin entre l'histoire, le patrimoine et l'Art contemporain donne une belle façon pour le public d'aborder des œuvres qu'ils n'auraient pas découvertes autrement, et l'on s'aperçoit que l'alchimie fonctionne."
Corinne Pradier, Présentation de l'oeuvre réalisée pour l'église Saint Germain de Daumeray
"Le personnage, l'humain est ce qui m'intéresse. Je peins pour traduire des émotions, des sentiments. Je ne traite pas le décor. La plupart du temps, je découpe la toile au format qui est parfois surprenant. Le fond est fait de couches superposées de papiers transparents et de peinture qui donnent un effet vitrail.
L'église de Daumeray présente de grands murs. À gauche en entrant, j'ai réalisé de grandes toiles découpées en arrondi. Elles entourent des fenêtres et des plaques d'écritures gravées., J'ai voulu raconter une histoire, poser une mise en scène.
Au fond, le plus à l'ombre, il y a un groupe de personnages qui semblent repliés, arc-boutés pour protéger leur Terre . C'est un peu le mythe de la caverne de Platon. Il s'agit là de l'ignorance, de l’intolérance, de l'incapacité à s'ouvrir au monde. Allant vers la lumière, la fenêtre , un personnage au contraire, se laisse porter vers le soleil, c'est Orphée le poète. Eurydice à son tour se laisse atteindre et attirer. Le destin, le libre arbitre sont des thèmes pour moi sources d'inspiration. Comment donner un sens à la vie. Quelle est la part de l'autre dans notre parcours, nos décisions, je ne peux m'empêcher d'être optimiste et confiante.
Sur le grand mur en face, dans une forme de gros œuf , un personnage juste dessiné de couleur sanguine rappelle les fresques romanes. La question se pose toujours, « que sommes nous, d'où venons nous, où allons nous ». L'église datant du XIème siècle me renvoie à cette interrogation intemporelle.
Il y a aussi deux panneaux, deux couples. L'un d'eux semble découvrir, l'autre réfléchir. Au dessus d'eux, une voûte rappelle celle du lambris éclairé du plafond de l'autel. J'ai été inspirée là par la cérémonie de mariage du braconnier Rouget qui s'est marié à St-Germain et dont on fête tous les ans l’événement.
Mon idée a été de fondre mes peintures dans le décor de l'église comme si elles avaient toujours été là avec les questions qu'elles posent."
Corinne Pradier-Boillot
Corinne Pradier - Présentation de l'oeuvre par Art et Chapelles le jour de l'inauguration
"L'église de Daumeray est un magnifique édifice, qui est sans doute à la limite de ce que nous pouvons envisager pour Art et Chapelles. Non seulement elle est vaste, mais dans sa simplicité, elle dégage une force un peu impressionante. Pour pouvoir se confronter à un tel espace, il fallait un artiste qui non seulement soit capable de travailler sur de grands formats mais qui surtout soit en mesure de dégager une puissance d’expression qui lui permette de vraiment prendre sa place dans cette église.
C’est le défi qu’a magnifiquement rélevé Corinne Pradier. Elle vit et travaille à Montgeron et j’ai vu pour la première fois son travail il y a deux ans dans une exposition au Mans.
Les personnages qu’elle peint ont une présence physique et spirituelle étonnante, et une grande force symbolique et poétique. Avec eux, elle habite véritablement cette église d’une façon à la fois puissante et émouvante, en nous proposant à son tour sa vision du monde et son regard sur le destin de l’homme."
Marion Julien